Europe : Google doit proposer un droit à l'oubli aux internautes
Juridique : La Cour de Justice de l'Union Européenne estime que le moteur doit désindexer des contenus à la demande d'individus concernés. Mais le droit à l'oubli doit s'appliquer au cas par cas, notamment pour des informations ayant trait à la vie publique.
Dans le très sensible dossier du droit à l'oubli sur le Web, la décision de la CJUE (Cour de Justice de l'Union Européenne) était particulièrement attendue. Elle fait suite à la saisine d'un particulier contre Google.Cet espagnol nommé Mario Costeja González avait saisi la juridiction en 2009 afin d'exiger de Google qu'il désindexe de son moteur des contenus le concernant. Il s'agissait en fait de la version numérique d'une annonce légale publié par un quotidien concernant une saisie immobilière l'ayant frappé pour recouvrement de dette.
Après avoir réglé son débiteur, l'homme considérait alors que cette mention devait disparaître des arcanes du Web. Il saisi alors la CNIL espagnole afin que ces contenus soient effacés des archives du journal mais aussi de Google. Ce qu'on appelle le droit à l'oubli.
La CNIL locale somme alors de Google d'accéder à ces demandes mais le moteur refuse et entame une procédure devant la justice espagnole qui elle même se retourne vers la CJUE pour trancher.
Arrêt surprise
Or, l'avis de la CJUE est sans appel et risque de bouleverser les indexations d'informations concernant les individus. Oui, Google doit proposer aux internautes la possibilité de désindexer des résultats de recherche les concernant.
"En recherchant de manière automatisée, constante et systématique des informations publiées sur Internet, l’exploitant d’un moteur de recherche procède à une « collecte » des données au sens de la directive" de 1995 sur la protection des données à caractère personnel", explique la cour.
Etant donné que Google "extrait, enregistre et organise" les dites données, il est "responsable du traitement" et dépend donc du droit européen qui impose d'offrir un droit d'accès aux données ainsi collectées, pour peu qu'elles concernent le plaignant.
La CJUE ajoute que Google est particulièrement responsable du fait de "l’effet de l’ingérence dans les droits de la personne (qui) se trouve démultiplié en raison du rôle important que jouent Internet et les moteurs de recherche dans la société moderne, ces derniers conférant un caractère ubiquitaire aux informations contenues dans les listes de résultats".
De son côté, Google se retranche derrière le sacro-saint droit à l'information. Une notion hautement délicate à encadrer et à définir. En ce sens, la cour estime que donc les demandes de retrait doivent être examinées au cas par cas. Ainsi, si le plaignant demande le retrait d'informations personnelles ayant trait à la vie publique, on pense à des élus condamnés par exemple, la requête pourra être rejetée.
Pour les observateurs, cette décision de la CJUE constitue une surprise. En effet, elle va à l’encontre de l’avis de l’avocat général qui avait considéré que Google n’était pas responsable des données personnelles indexées dans son moteur, annulant de fait les demandes de droit à l'oubli.
Rappelons que le droit à l’oubli numérique est défini de la manière suivante par la Commission européenne dans son projet de règlement :
« Toute personne devrait avoir le droit de faire rectifier des données à caractère personnel la concernant, et disposer d'un "droit à l'oubli numérique" lorsque la conservation de ces données n'est pas conforme au présent règlement. En particulier, les personnes concernées devraient avoir le droit d'obtenir que leurs données soient effacées et ne soient plus traitées, lorsque ces données ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été recueillies ou traitées, lorsque les personnes concernées ont retiré leur consentement au traitement ou lorsqu'elles s'opposent au traitement de données à caractère personnel les concernant ou encore, lorsque le traitement de leurs données à caractère personnel n'est pas conforme au présent règlement. »
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